C’est la rentrée, septembre, les feuilles mortes que l’on ramasse à la pelle. Il est donc temps de reprendre les bonnes habitudes et de vous proposer un nouveau podcast mythologique. Bien plus courte que la fois précédente, cette histoire va vous faire meugler d’indignation.
Pasiphaé

Photo (C) RMN-Grand Palais / René-Gabriel Ojéda
Le maître des Cassoni Campana est un maître italien ou français, anonyme, qui a peint des sujets mythologiques et religieux lors du Cinquecento à Florence. Ce pseudonyme lui vient de l’achat d’une série de panneaux de coffres italiens pour le musée du Louvre par Napoléon III auprès de Giampietro Campana, un aristocrate italien connu pour avoir réuni une importante collection d’objets d’art.
Les cassoni sont des coffres de mariage commandés par l’époux et décorés sur les panneaux intérieur et extérieur. On y rangeait une partie de la dot et du linge de la future mariée. Objets d’apparat, ils étaient destinés à orner la chambre nuptiale. Les scènes qui y étaient peintes devaient, officiellement, rappeler la morale du mariage
Le panneau de bois illustre les amours de Pasiphaé. Il faut déjà comprendre que dans l’espace de ce jardin idéalisé, à la perspective maîtrisée, se déroulent plusieurs scènes avec les mêmes personnages. Ces scènes représentent les différentes étapes du mythes. La composition du tableau est extrêmement rigoureuse: le palais à droite, lieu de pouvoir et d’organisation civile s’oppose à la dense forêt, symbole des pulsions. Une disposition en miroir place Pasiphaé à la porte du palais et à la lisière de la forêt alors que le taureau blanc se trouve au centre du tableau. De là, il attire les regards. Une certaine douceur semble d’ailleurs se dégager de l’animal. On peut se rappeler que c’est sous la forme d’un taureau de Zeus séduit Europe…
A gauche du tableau au premier plan, des escaliers mènent au palais. De la loggia, une femme contemple la scène. Il s’agit de Pasiphaé, la reine de Crète. Elle semble spectatrice de sa propre histoire.
A l’arrière plan, on peut observer une scène de sacrifice. Une femme, Pasiphaé, et un prêtre – ou Minos – encadrent un autel fumant. Au sol git un taureau mais il ne s’agit pas de l’animal promis à Poséidon puisque le taureau blanc se trouve aux côtés de la reine.
Au premier plan à droite, le taureau et Pasiphaé sont face à face. Elle lui tend de l’herbe qu’elle vient de couper avec une petite serpe. On se rappelle que Pasiphaé tente de séduire le taureau, de l’attirer. On peut aussi remarquer une étoile sur le front de l’animal qui pourrait signifier qu’il est marqué par Poséidon.
Au centre du tableau, Pasiphaé se trouve face à un homme. Elle désigne le taureau blanc de la main. J’ai des difficultés à analyser cette scène. On pourrait d’abord penser que l’homme est Dédale à qui Pasiphaé confie la mission de l’aider à séduire le taureau. Mais il pourrait aussi et surtout s’agir de Poséidon puisqu’il a dans la main un trident et est couronné. Ce serait alors le moment où le dieu inspire à la reine sa passion monstrueuse.
C’est le même personnage au trident que l’on retrouve à l’arrière plan à droite. Il soulève la peau de la vache factice et laisse Pasiphaé se dissimuler à l’intérieur. On voit la robe de la reine flotter sous l’animal roux. Le fait que le taureau blanc se dirige vers la fausse vache qui lui tourne le dos laisse supposer que l’accouplement va avoir lieu. Le chemin qui serpente pénètre d’ailleurs la forêt à cet endroit précis.
La scène du premier plan à droite me semble encore plus difficile à expliquer. Elle pourrait concentrer plusieurs épisodes du mythe. Un homme abat un bovidé roux d’un coup de hache. Il peut s’agir de l’animal sacrifié pour le dieu Poséidon ou bien de l’animal dont la peau a été utilisée pour tromper le taureau. Pasiphaé, quant à elle, s’appuie sur une canne. Est-ce un symbole de pouvoir? Est-ce le signe que son ventre est lourd du futur Astérion?
On peut se demander quelle morale du mariage se cache derrière cette peinture. Est-ce un rappel des dangers de l’adultère?
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