Titre: Pierrette
Auteurs: Honoré de Balzac
Éditions: Folio classique
Date de parution originale: 1840
Dans cette année avec Balzac, découvrez cette fois un court récit qui fait partie du triptyque des Célibataires avec Le Curé de Tours et La Rabouilleuse.
Pierrette, une jeune bretonne, accablée par les malheurs et orpheline est recueillie par les Rogron, une vieille fille et son frère encore célibataires. Arrivée à Provins, Pierrette est d’abord l’outil de promotion des Rogron qui cherche une place dans la petite société grâce à elle. Mais bientôt Pierrette devient leur bonne. Maltraitée, épuisée, la petite Pierrette reprend espoir quand son ami Brigault arrive à Provins. Mais la vieille Sylvie Rogron est jalouse de Pierrette qu’elle croit aimée du colonel qu’elle-même convoite. Les persécutions s’aggravent alors.
Balzac signe ici un récit cruel contre la bêtise. La jeunesse innocente incarnée par Pierrette est aux prises avec une vieillesse perverse et aigrie: Sylvie Rogron. Le récit, en écho au Curé de Tours, met en place un schéma de persécution terrible, aux noeuds aussi serrés que dans une tragédie. Toutes les émotions traversent ce roman: les douceurs de l’amour, la pitié, la révolte, la colère, l’angoisse. Le lecteur ne peut qu’être emporté par la douce figure de Pierrette.
Le Curé de Tours comme Pierrette cherchent à montrer que le célibat est un état contraire à la société. Les curés, les vieilles filles et les vieux garçons cultivent leur égoïsme et leur amertume à l’excès et ne comprennent plus le jeu délicat de la société. Ces vieilles filles chez Balzac deviennent des archétypes proches de la sorcière des contes et leurs portraits sont d’une férocité remarquable. Mais au delà de la charge contre la vieille fille, on peut lire dans ces romans une âpre description de la société de province, de ses ambitions et de ses manipulations. La province apparaît comme un modèle réduit de Paris où tout est plus mesquin et sans panache.
La fin, cruelle et cynique, dénonce avec ironie le fonctionnement de la justice et ses interactions avec la politique. C’est la première fois que Balzac me semble si engagé. On retrouve d’autres éléments plus proches du réalisme social: les petites gens, c’est-à-dire Brigault, son maître artisan, la bonne sont peints comme des personnes de coeur, compatissantes et généreuses. Les élites au contraire se caractérisent par leur indifférence, leur brutalité et leur mesquinerie.
Ce roman, assez peu connu, est une très bonne surprise!
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